jeudi, septembre 19, 2024
Accueil > Actualités > COTE D’IVOIRE : LE FLOU PERSISTE SUR LES CONTOURS ET LE CALENDRIER DE LA REFORME DE LA COMMISSION ELECTORALE

COTE D’IVOIRE : LE FLOU PERSISTE SUR LES CONTOURS ET LE CALENDRIER DE LA REFORME DE LA COMMISSION ELECTORALE

Quand se fera la réforme de la Commission électorale indépendante (CEI) en Côte d’Ivoire ? Et quel en sera l’ampleur ? Au lendemain des élections locales du 13 octobre, le sujet est au centre du débat en Côte d’Ivoire.

La réforme de la Commission électorale indépendante est au cœur des revendications politiques depuis plusieurs mois. L’institution qui a proclamé les résultats provisoires des élections locales du 13 octobre dernier, présidée depuis 2010 par Youssouf Bakayoko, est régulièrement décriée dans les rangs de l’opposition.

Mais, alors que la chambre administrative de la Cour suprême doit encore entamer l’étude des recours en annulation déposés par des candidats aux élections locales, il faudra attendre plusieurs semaines avant de connaître les contours exacts de la réforme envisagée par l’exécutif.

Les négociations espérées n’ont pas eu lieu

Lors de son discours à la nation du 6 août 2018, à la veille de la commémoration de l’Indépendance, le président Alassane Ouattara avait déclaré : « Comme le recommande la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, j’ai instruit le gouvernement à l’effet de réexaminer la composition de la Commission électorale indépendante et je souhaite en effet que les prochaines élections soient inclusives et sans violence. »

Cette annonce avait suscité l’espoir chez les opposants, qui s’attendaient à l’ouverture de négociations sur ce dossier avant les élections municipales et régionales du 13 octobre. Il n’en fut rien.

Le Front populaire ivoirien (FPI, de Laurent Gbagbo) avait déjà porté la charge, dès le 17 août, estimant que « le message du chef de l’État est un leurre, voire une manœuvre d’endormissement de l’opposition ». L’absence d’ouverture de négociations sur la réforme de la CEI a été l’un des arguments avancés par une partie de l’opposition pour justifier l’appel au boycott du scrutin du 13 octobre.

Le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI d’Henri Konan Bédié, ancien allié du RDR de Ouattara) a pour sa part réclamé fin octobre une réforme de la CEI « en profondeur, avec toutes les forces vives de la Nation, sans exclusive, pour qu’elle devienne une institution fiable et viable », pour reprendre les mots de Jean-Louis Billon, secrétaire à la communication du PDCI.

Une réforme « avant la présidentielle de 2020 »

En face, le camp présidentiel semble décidé à prendre son temps. « Sur la réforme de la CEI, le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP, coalition de la majorité présidentielle) s’insurge contre la mise en doute ou la falsification de la parole du chef de l’État », a riposté mardi 6 novembre le très médiatique ministre des Ressources halieutiques, Kobenan Kouassi Adjoumani.

S’exprimant lors d’une conférence de presse à l’hôtel du Golf, le ministre a assuré qu’Alassane Ouattara « a été clair dans son message à la nation du 6 août 2018, en indiquant que la réforme de la CEI interviendra avant la présidentielle de 2020, mais pas avant les élections locales du 13 octobre 2018 ».

Or, de source proche de la CEI, les 102 recours ne sont pas encore parvenus à la chambre administrative de la Cour suprême. L’instance – présidée par Pierre Claver Kobo, un magistrat réputé intègre au sein d’un appareil judiciaire régulièrement accusé par les opposants d’être au service des pouvoirs politiques – n’a donc pas encore commencé à se pencher sur les recours en annulation, accusations d’irrégularités et autres soupçons de fraudes. Les dossiers seront transmis à la Cour suprême avant la mi-novembre, assure notre source. Les quatorze juges de la chambre administrative disposeront alors d’un mois pour trancher.

« C’est à l’issue du contentieux électoral, après les scrutins partiels dans les circonscriptions où le vote est à reprendre et après la publication des résultats définitifs des élections locales, que la question de la CEI va véritablement se poser », assure à Jeune Afriqueun conseiller à la présidence.

« En clair, les discussions entre le gouvernement et les partis politiques sur la recomposition de la CEI, comme annoncé par le président de la République, seront ouvertes à la fin du processus électoral ». Soit, selon les prévisions, à partir de janvier prochain, date du deuxième anniversaire de l’arrivée d’Amadou Gon Coulibaly à la tête du gouvernement.

Quelle ampleur pour la réforme ?

Autre flou persistant sur ce dossier : la question du périmètre de la réforme qui sera engagée. Dans son discours du 6 août, le président Alassane Ouattara avait évoqué la « composition » de la CEI, alors que les acteurs politiques, aussi bien au sein de l’opposition que de la mouvance présidentielle, préfèrent parler de « réforme » de l’institution.

La question de la « composition » n’est que l’un des points de la « réforme » attendue de la CEI. Actuellement, le bureau central de la CEI compte dix-sept membres, dont quatre issus de la mouvance présidentielle, quatre de l’opposition, quatre de la société civile et cinq présents au titre des institutions de la République, notamment de la présidence. La présence de ces cinq derniers membres fausse, de fait, l’équilibre des forces au sein du bureau.

Parmi les autres aspects de la réforme attendue au sein de l’opposition figure également le découpage électoral. « Il est nécessaire que soit revu et redéfini le redécoupage des circonscriptions électorales. Car dans le nord du pays [fief électoral du parti au pouvoir, ndlr], on enregistre 69 mairies pour une population de 469 000 habitants, contre 28 mairies pour une population de deux millions d’habitants dans le sud, proche de l’opposition », pointait ainsi le PDCI, fin octobre.

Alassane Ouattara va-t-il maintenir sa position en limitant la réforme à une refonte de cette composition de la CEI ou va-t-il proposer une réforme en profondeur, incluant notamment le redécoupage électoral et la révision du code électoral ? Il faudra attendre janvier prochain pour connaître la réponse.

Jeune Afrique

Laisser un commentaire