La pression internationale s’est accentuée, mercredi, sur la junte militaire qui a pris le pouvoir au Mali en arrêtant le président Keïta et son Premier ministre. L’Union africaine a annoncé la suspension du pays au sein de son organisation.
La communauté internationale continue de réagir, au lendemain du coup d’État qui a renversé le gouvernement malien. L’Union africaine a annoncé, mercredi 19 août, la suspension du Mali de l’organisation « jusqu’au rétablissement de l’ordre constitutionnel ». Le président en exercice de l’UA, le Sud-Africain Cyril Ramaphosa, a par ailleurs exigé la « libération immédiate » du président Ibrahim Boubacar Keïta, toujours détenu au lendemain de son arrestation par l’armée.
Une réaction qui rejoint celle des États-Unis et de l’Union européenne, dans la même journée. À l’issue d’un sommet extraordinaire de l’UE, les 27 ont réclamé un « retour immédiat de l’État de droit » dans le pays. « La stabilité de la région et du Mali, la lutte contre le terrorisme doivent demeurer des priorités absolues », a déclaré le président du Conseil européen, Charles Michel, soulignant « l’extrême préoccupation » des Européens.
La réaction était tout aussi virulente de l’autre côté de l’Atlantique. Washington a ainsi « condamné fermement la mutinerie du 18 août au Mali comme nous condamnerions toute prise du pouvoir par la force », a insisté le chef de la diplomatie américaine, Mike Pompeo, sans parler de coup d’État.
Parmi les pays voisins, l’Algérie, qui partage 1 400 km de frontières avec le Mali et a joué un rôle important dans les pourparlers de paix dans ce pays, « réitère son ferme rejet de tout changement anticonstitutionnel de gouvernement ». De même, le Maroc, partenaire du Mali, s’est dit « attaché à la stabilité de ce pays ».
Le président Keïta et le chef du gouvernement, Boubou Cissé, étaient toujours mercredi au camp militaire de Kati, le quartier général des auteurs du coup d’État situé près de Bamako, a indiqué une source au sein du Comité national pour le salut du peuple (CNSP), l’instance créée mardi par les putschistes. D’autres responsables civils et militaires ont également été arrêtés mardi.
Appel de la junte à l’arrêt du vandalisme
De son côté, la junte au pouvoir à Bamako a appelé mercredi les Maliens à « vaquer librement à leurs occupations » et à « reprendre sainement leurs activités », réclamant également l’arrêt du vandalisme. Le comité « invite les fonctionnaires à reprendre le travail dès demain, jeudi 20 août 2020, et rassure les populations que toutes les dispositions sont prises pour la protection des personnes et des biens, ainsi que les lieux de travail », a ajouté Ismaël Wagué, chef d’état-major adjoint de l’armée de l’air et porte-parole des militaires
Le calme régnait toutefois mercredi dans la capitale, qui portait encore les stigmates des incidents ayant ponctué ce renversement de pouvoir. Les bureaux abritant le cabinet d’avocats de l’ex-ministre de la Justice Kassim Tapo ont notamment été attaqués et incendiés par des gens en colère. Les administrations et les banques étaient également fermées.
Couvre-feu et frontières fermées
Le président Keïta a annoncé à la télévision publique sa démission dans la nuit de mardi à mercredi, puis la dissolution du gouvernement et de l’Assemblée nationale. « Ai-je réellement le choix ? », a-t-il déclaré, en disant vouloir éviter que du sang ne soit versé pour qu’il se maintienne au pouvoir.
Le colonel-major Ismaël Wagué a ensuite annoncé la création du Comité national pour le salut du peuple, expliquant que les militaires avaient « décidé de prendre (leurs) responsabilités » face au chaos, à l’anarchie et à l’insécurité.
Les militaires ont appelé la société civile et les mouvements politiques à « créer les meilleures conditions d’une transition politique civile conduisant à des élections générales crédibles » dans un « délai raisonnable ». Les putschistes ont enfin annoncé la fermeture des frontières et l’instauration d’un couvre-feu, tout en tentant de rassurer la communauté internationale sur ses intentions. « Tous les accords passés » seront respectés, a affirmé le colonel Wagué.
La Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cédéao), médiatrice dans la crise qui frappe le Mali depuis juin, a condamné le putsch, et suspendu le pays de ses rangs. Elle doit se réunir jeudi en visioconférence. L’ONU a également dénoncé le putsch. Le Conseil de sécurité des Nations unies doit se réunir mercredi en urgence à huis clos sur le Mali, à la demande de la France et du Niger, qui préside actuellement la Cédéao, selon une source diplomatique.