Star du football allemand, Mesut Özil n’a pas eu besoin de chausser
ses crampons pour renvoyer dans leurs buts ses nombreux
détracteurs, dont le racisme a éclaté au grand jour à son retour en
Allemagne. L’élimination précoce et sans gloire de son équipe au
Mondial, source d’une profonde déception collective, ayant
exacerbé un nationalisme revanchard à son encontre d’une
incroyable véhémence.
Une victoire de l’Allemagne aurait sans doute fait taire les critiques
assassines et autres ressentiments haineux latents qui s’expriment
avec force depuis plusieurs semaines, sans garde-fous, et il y a fort
à parier que la photo de la discorde, prise aux côtés du président
Erdogan en juin dernier, serait alors apparue comme purement
anecdotique.
Mais il en a été tout autrement, au point que le célèbre milieu de
terrain d’Arsenal d’origine turque, choqué et meurtri, a infligé
dimanche un sacré tacle au « racisme » et à ses relents fascistes
nauséeux, en annonçant sa décision ferme et irrévocable : il ne
jouera plus pour l’Allemagne.

Il a eu beau insister sur le fait que le cliché photographique,
le montrant souriant en présence de l’homme fort d’Ankara, alors
que la campagne présidentielle battait son plein en Turquie, n’avait
aucune « intention politique », rien n’y a fait… La suspicion de
déloyauté envers son pays pèse désormais sur lui, amplifiée par
certains observateurs allemands restés sourds à ses dénégations.
Sitôt postée sur Twitter, sitôt saluée par plusieurs ministres turcs,
la décision de Mesut Özil a mis en joie les autorités de l’autre côté
du Bosphore, à l’instar du très enthousiaste Abdülhamit Gül,
le ministre de la Justice. « Je félicite Mesut Özil qui, en quittant
l’équipe nationale d’Allemagne, a marqué le plus beau but contre
le virus du fascisme ! », a-t-il réagi en usant d’une métaphore
footballistique éloquente, tandis que son homologue des Sports,
Mehmet Kasapoglu, lui faisait écho en déclarant soutenir
« pleinement la position honorable de notre frère Mesut Özil ».
Ce dernier a mis en exergue la photo qui fâche et dont l’un des
mérites est d’avoir révélé publiquement la résurgence des vieux
démons de l’autre côté du Rhin…
Avant même qu’il renonce définitivement à mouiller le maillot pour
l’Allemagne, le porte-parole du président turc, Ibrahim Kalin,
déplorait vivement que ce grand joueur qu’est Mesut Özil soit en
butte à la pire forme d’intolérance qui soit. « Quel dommage pour
ceux qui se disent tolérants et multiculturalistes ! », s’était-il ému sur
Twitter.