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COVID-19 : LES TRAVAILLEUSES DU SEXE DE FRANCE RÉCLAMENT L’AIDE DE MACRON

Privés de ressources ou exposées au coronavirus, les prostitués sont largement victimes de la crise. Des associations demandent un fonds exceptionnel à l’État afin d’aider ces femmes et ces hommes – environ 40 000 en France, selon les associations – qui manquent de produits de première nécessité et pourraient rapidement se retrouver à la rue

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Ève (1) a 70 ans et 47 années de prostitution. Elle préfère garder son identité secrète, « pour protéger mes enfants et mes petits-enfants ». Quand le coronavirus s’est avéré sérieux, elle a tout de suite arrêté le travail. « Et cela a été la même chose pour toutes les filles dans mon coin, assure Ève. Il n’y avait plus personne dans la rue ou dans les camionnettes, nous n’avons même pas attendu l’annonce officielle du confinement ! » Elle explique cette réaction par l’expérience des plus anciennes, qui ont connu l’épidémie de sida.

Le risque de se retrouver à la rue

Mais l’arrêt de cette activité est synonyme de période de disette. « Nous avons les mêmes problèmes que les autres sauf que nous ne recevons d’aide de personne. » D’après Ève, certaines femmes ne pourront faire face à cette crise. « Notre travail n’est pas déclaré, nous sommes toute en location, sous-location, voire à l’hôtel, comment va-t-on payer le loyer ? » Elle est particulièrement inquiète pour les étrangères, victimes de proxénètes et de marchands de sommeil. « Certains n’hésiteront pas à mettre ces femmes dehors, sans papier, sans revenu, parfois avec des enfants. »

Françoise Gil, la présidente de l’association « Bus des Femmes », s’inquiète aussi de la perte brutale de toute ressource financière de certaines prostituées. « Nous nous organisons pour distribuer des repas et certains produits de premières nécessité, explique-t-elle. Nous avons créé une cagnotte et, avec l’association Basiliade, nous arrivons à donner 350 € aux personnes dans les situations les plus extrêmes, mais c’est tellement peu… »

Certaines femmes continueraient à travailler

« Les situations sont très diverses », expose Claire Quidet, présidente du Mouvement du Nid, une association qui aide les personnes en situation de prostitution qui souhaitent être accompagnées. D’après elle, la difficulté vient surtout des femmes qui n’ont entamé aucune démarche et avec qui les associations ont du mal à rester en contact. « Nous avons dû fermer nos permanences pendant le confinement et avons ainsi perdu de vue des personnes dans la rue : nous craignons que des femmes soient forcées à continuer leur activité. »

Sur ce sujet, difficile d’avoir des certitudes. Françoise Gil cite une des adhérentes de son association qui l’aurait appelée : « Je suis retournée travailler, c’est une bêtise. » Des bénévoles du Mouvement du Nid ont rencontré plusieurs femmes dans la rue depuis le confinement, mais ces dernières assurent que les clients « manquent ». L’association dénonce néanmoins le comportement de certains hommes, des habitués qui contacteraient des femmes par téléphone et proposeraient des sommes d’argent plus importantes afin qu’elles acceptent de recevoir chez elles.

Des associations en appellent à Emmanuel Macron

Dans ce contexte, plusieurs associations demandent l’aide de l’État. « Un fonds d’urgence doit être créé afin de permettre un revenu de remplacement le temps du confinement, sans condition de régularité de séjour », a ainsi écrit dans une lettre à Emmanuel Macron la Fédération Parapluie Rouge, qui réunit les associations de santé communautaire des travailleuses du sexe, dont le Bus des Femmes.

Du côté du Mouvement du Nid, on dit avoir écrit à plusieurs ministères, sans réponse pour le moment. « La réponse pourrait se trouver du côté des commissions départementales, lance Claire Quidet. Une aide financière serait nécessaire pour les femmes qui ne bénéficient pas des minima sociaux, et une plateforme pourrait être créée afin de mutualiser les informations, comme les hébergements d’urgence disponibles, et les communiquer aux associations. »

Ludovic Séré, le 07/04/2020 à 18:53

(1) Le prénom a été changé.

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