L’Eglise orthodoxe russe annonce ce lundi 15 octobre avoir rompu toute relation avec le patriarcat de Constantinople, plus haute autorité morale du monde orthodoxe. Cette déchirure historique au sein du monde orthodoxe est la conséquence directe de la décision prise la semaine dernière par Constantinople, de reconnaître l’indépendance de l’Eglise ukrainienne.

C’est un schisme historique au sein de l’Eglise orthodoxe. A l’issue d’un synode de plusieurs heures à Minsk, le patriarcat de Moscou a annoncé renoncer à toute relation avec celui de Constantinople. « Nous n’avions pas d’autre choix, pas d’autre solution », a expliqué très solennellement le métropolite Hilarion, chargé de la diplomatie au sein de l’Eglise russe.

« Cette décision était inévitable : notre Saint-Synode ne pouvait en prendre une autre du fait des actions récente du patriarcat de Constantinople, a-t-il poursuivi. Il y a quelques jours, celui-ci a décidé d’annuler l’excommunication du philarète Denisenko, le dirigeant de l’Eglise schismatique d’Ukraine. En faisant cela, il s’est exclu de lui-même du champ canonique de l’Eglise orthodoxe. »

Cette rupture n’a qu’une seule origine : la reconnaissance par Constantinople de l’indépendance des Eglises ukrainiennes vis-à-vis de Moscou. Une ligne rouge qu’il ne fallait pas franchir pour l’Eglise russe, qui perd en Ukraine une large partie de son influence et de ses fidèles.

Avec la proclamation de l’indépendance de l’Eglise ukrainienne encouragée par le gouvernement ukrainien et le patriarche de  Constantinople, le patriarcat de  Moscou pourrait également se voir amputé de son patrimoine. L’Ukraine est le berceau historique de l’orthodoxie russe née à Kiev en 988. C’est là que se furent érigées de  splendides monastères et on y dénombre plus de 10 000 églises.

Choisir entre deux camps

En prononçant la rupture avec Constantinople, Moscou ouvre une crise très grave au sein du monde orthodoxe. Les 300 millions de fidèles qui composent la communauté orthodoxe vont devoir en effet choisir entre les deux camps, indique notre correspondant à Moscou,Daniel Vallot. D’un côté le patriarcat de Constantinople, le plus ancien, doté de la plus haute autorité spirituelle, de l’autre celui de Moscou, de loin le plus puissant et le plus influent puisqu’il « contrôle » plus de 100 millions de fidèles.

« Cela va provoquer beaucoup de blessures », prédit Antoine Arjakovsky, historien et directeur de recherche au Collège des Bernardins à Paris, spécialiste du monde orthodoxe. « Le cas s’était déjà produit en 1996 autour de l’Estonie. Cela avait duré cinq ou six mois, rappelle-t-il. Là, le problème, c’est que l’Ukraine était revendiquée par le patriarche Cyrille de Moscou comme étant son précarré. Donc je ne pense pas que cela va se régler rapidement. »

Ce divorce va sans doute entraîner une lutte d’influence entre les deux patriarcats pour le contrôle des autres Eglises composant le monde orthodoxe. Celui-ci est organisé en une quinzaine de patriarcats ou d’Eglises indépendantes, dites « autocéphales ». « La plupart des Eglises à mon avis, seront légitimistes et vont suivre la voie de l’ordre. Parce que Constantinople représente l’autorité, la tradition, la légitimité. Et je vois mal une Eglise aussi importante que l’Eglise roumaine ne pas suivre cette voie », avance Antoine Arjakovsky.

Mais pour l’historien, ces Eglises pourraient aussi avoir un rôle de médiatrice et tenter de reconstituer le lien entre les patriarcats de Moscou et Constantinople.

RFI

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