Accusée de prosélytisme chiite, la maison d’édition iranienne « Ahl al-Bayt » a vu ses livres saisis au Salon international du livre d’Alger. D’autres ouvrages sur le wahhabisme, la sorcellerie ou la magie noire ont été interdits en amont du salon.
Les ouvrages de l’éditeur iranien « Ahl al-Bayt », présent au Salon international du livre d’Alger (Sila), ont été saisis et son stand fermé par les organisateurs de l’événement, mercredi 31 octobre, pour « non-respect du règlement intérieur du Sila ». En cause, les ouvrages présentés au public algérien sont soupçonnés de prôner un « chiisme radical », d’après des sources locales.
Le service des douanes algériennes, qui fait partie de la commission de lecture du Sila, s’est dit particulièrement vigilants concernant le chiisme. Chaque année, la liste des éditeurs et des livres exposés doit être validée par cette commission avant ouverture du salon. Outre le service des douanes, des représentants du ministère des Affaires religieuses, du ministère de la Culture et de l’Intérieur en sont membres.
« De temps en temps, on observe ce genre de chasse aux sorcières visant à rassurer les Algériens sur une éventuelle tentative de ‘chiisation’ de l’Algérie [par l’Iran]. L’opinion publique ici est très inquiète des tentatives d’ingérences extérieures, une inquiétude instrumentalisée par l’État qui veut montrer qu’il sait rassurer », analyse Amel Boubekeur, chercheuse à l’EHESS, spécialisée dans l’islam en France et au Maghreb. Dans les faits, explique la spécialiste, la communauté chiite algérienne, localisée dans les grandes villes, ne comprend pas plus de 2 000 personnes.
Wahhabisme, sorcellerie, magie noire…et homosexualité
À l’origine de la polémique concernant le stand iranien, une page Facebook suivie par plus de 300 000 personnes et liée à un cheikh salafiste algérien, Mohamad Ali Ferkous. La page avait signalé la présence de livres comportant des passages « insultants à l’égard des proches et des femmes du Prophète ». Elle enjoignait les autorités à intervenir.
Les livres iraniens ne sont pas les seuls à avoir été bannis des rayons de ce salon international. France 24 a eu accès à une liste d’une quarantaine d’ouvrages interdits juste avant l’ouverture du salon, dont plusieurs sur le wahhabisme, sur lesquels le service des douanes s’est dit cette année « très sévère ». Quelques livres marocains traitant de sorcellerie, de magie noire ou encore du Sahara occidental ont également été écartés.
Pour sélectionner les livres exposés lors de ce salon, la commission se base sur un règlement intérieur qui interdit, par exemple, les ouvrages parlant d’homosexualité, ou encourageant le racisme et l’appel à la haine.
Larousse et ses cartes sur le Sahara Occidental
Chaque édition du Sila est marquée par des saisies de livres. Cette année, aucun ouvrage édité en France n’était concerné.
En revanche, les années précédentes, Larousse avait été ciblé par un contrôle de la commission à cause des cartes contenues dans ses ouvrages. Celles-ci ne représentaient pas la délimitation du Sahara occidental, reconnue par l’Algérie. Alger soutient l’indépendance de ce territoire – et donc sa mention sur les cartes – contrairement à son voisin marocain.
France 24