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POURQUOI LE RALLYE DAKAR A DEMENAGE EN ARABIE SAOUDITE EN 2020 ?

Après 11 éditions en Amérique latine, le rallye migre. Crise en Amérique du Sud, volonté d’ouverture. Retour sur les coulisses d’une décision surprenante.

Le Dakar, le rallye-raid le plus éprouvant au monde, a changé  une nouvelle de continent. Onze ans après avoir quitté l’Afrique pour l’Amérique latine, l’épreuve créée par Thierry Sabine se tient depuis janvier 2020 en Arabie saoudite. Le Point retrace les événements qui ont conduit le rallye Dakar à s’exporter dans cette zone.

L’Amérique latine en proie à la crise économique

Il y a un an, l’annonce officielle du Dakar 2019 avait déjà été retardée. Jusqu’au bout, les organisateurs souhaitaient s’attacher l’accord de plusieurs pays, mais seul le Pérou avait fait part de sa volonté d’en faire partie. En cause notamment : la crise économique qui secoue de nombreux pays d’Amérique latine. En Argentine, le PIB a reculé de 2,6 % en 2018 et le peso a perdu plus de 50 %. Au Chili, Sebastián Piñera, élu pour un deuxième mandat en décembre 2017, a multiplié les mesures d’austérité. La Bolivie, qui accueille l’épreuve sans discontinuer depuis 2014, avait également renoncé, évoquant par la voie du ministre de la Culture une « absence d’accord qui convienne » avec les organisateurs. À ASO, on assurait néanmoins que des contacts sont déjà pris pour 2020.

Puis le patron de l’épreuve, Étienne Lavigne, évoquait pour la première fois la possibilité d’un départ d’Amérique du Sud, citant notamment l’Angola ou l’Afrique du Sud. « Il s’agissait clairement de trouver une alternative aux pays sud-américains », explique un proche du dossier. Par ailleurs, les concurrents sont friands de nouveaux terrains d’expression pour la pratique de leur sport et ils aspirent à retrouver le caractère itinérant du Dakar. La dernière édition, avec plusieurs étapes disputées dans les mêmes zones de dunes, a parfois fait grincer des dents. Il fallait trouver un nouveau parcours.

 

 

 

L’Arabie saoudite et le modèle qatari

Ces derniers mois, tout en conservant un contact régulier avec les gouvernements latinos, les organisateurs commencent à sonder d’autres pays. L’hypothèse sud-africaine est rapidement écartée en raison d’un grand nombre de parcs naturels. En revanche, les premiers contacts avec l’Arabie saoudite se montrent fructueux. Depuis plusieurs années, Ryad tente de s’ouvrir afin d’anticiper l’ « après-pétrole » en misant sur le « soft power » avec des investissements touristiques et sportifs. Les pays voisins, le Qatar et les Émirats arabes unis, l’ont d’ailleurs fait avec succès.

En octobre 2018, l’Arabie Saoudite a accueilli un match amical de football entre l’Argentine et le Brésil, puis la manche inaugurale de la Formule E en décembre ainsi que la Supercoupe d’Italie en janvier 2019 (Juventus-AC Milan). Le régime profite de ces évènements pour démontrer qu’il s’ouvre sur le monde : 15 000 femmes ont ainsi assisté au match entre les deux clubs italiens – même si elles étaient confinées dans un secteur du stade – et des milliers de jeunes étaient présents aux concerts organisés en marge de la Formule E. « Nous avons été bluffés par l’accueil et l’enthousiasme des Saoudiens », nous confiait récemment un membre du championnat 100 % électrique.

Les relations avec Riyad ne se sont jamais interrompues

Par ailleurs, le prince héritier MBS continue de poursuivre sa politique d’ouverture incluant le Dakar. L’accord avec les autorités saoudiennes, qui portent sur les cinq prochaines années, permet aux organisateurs du rallye-raid de penser déjà aux parcours des prochaines éditions.

Un futur tracé pourrait par exemple passer par Oman – où ASO organise le tour d’Oman (cyclisme) depuis 2010 – ou encore rallier l’Égypte qui avait déjà accueilli l’arrivée de l’épreuve en 2000 et en 2003.

« Sportivement, on va se régaler »

Ironie de l’histoire, le tenant du titre du dernier Dakar, Nasser Al-Attiyah, est qatari. Or, l’Arabie saoudite a rompu toutes ses relations diplomatiques avec le micro-État depuis juin 2017. Pourtant, le pilote Toyota se veut rassurant : « Des deux côtés, tout le monde sait faire la part des choses et bien distinguer la politique et le sport », confie-t-il au Point. Lui-même s’est déjà rendu à deux reprises en Arabie saoudite pour d’autres rallyes. « Je suis persuadé que l’accueil sera à la hauteur : « les Saoudiens ont envie de montrer une autre image de leur pays. »

Les zones désertiques qui composent ce pays trois fois plus grand que la France offrent un terrain de jeu idéal pour le rallye-raid. « Sportivement, les pilotes comme les téléspectateurs vont se régaler avec des paysages magnifiques et des dunes à perte de vue », explique Mathieu Beaumel, le copilote de Nasser al-Attiyah. « C’est dans l’ADN du Dakar de permettre de faire découvrir de nouveaux endroits et c’est aussi un aspect motivant », poursuit Adrien Van Beveren, actuellement le meilleur pilote français en moto.

En plus, certains aspects de ce Dakar en Arabie saoudite, encouragent  les organisateurs. Par rapport à l’Amérique latine, le décalage horaire sera bien plus favorable aux diffusions télévisées en France et dans les pays européens, là où le Dakar reste le plus populaire. Les arrivées pourront par exemple être diffusées systématiquement en direct, ce qui renforcera l’attractivité de l’offre sur le petit écran. Par ailleurs, l’épreuve pourrait compter un nouvel ambassadeur susceptible d’attiser la curiosité des fans : Fernando Alonso. L’Espagnol, double champion du monde de F1, a déjà effectué un premier test en mars dernier et ne cache pas être intéressé par une participation au Dakar… quelle que soit sa destination.

kemebrama@hotmail.com

AFP et le Point

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