Le nouveau Premier ministre Moctar Ouane doit faire face à une crise multidimensionnelle au Mali. Presque tout est à faire en 18 mois de transition. Car le Mali fait face à une crise politique, sociale, économique, sécuritaire et sanitaire, comme le rappelle Moussa Sidibé, politologue. Il pense qu’un audit de la gestion publique de ces 20 dernières années est nécessaire pour révéler les malversations financières.
« Tous les scandales financiers qui ont fait l’objet des articles de presse mais qui n’ont jamais fait l’objet de procédures judiciaires devant les juridictions compétentes. Cela a quand même laissé les Maliens sur leur faim et leur a fait dire pendant longtemps qu’il y avait beaucoup plus de communication sur la question cruciale de la lutte contre la corruption mais qu’il n’y avait pas d’actions concrètes sur le sujet. », précise le politologue.
Climat socio-économique difficile
Les Maliens attendent aussi la levée des sanctions de la Cédéao contre leur pays. En avril dernier, le Fonds monétaire international (FMI) a décaissé 200 millions de dollars pour soutenir l’économie malienne.
Mais le climat social pourrait être tendu dans les prochaines semaines si les accords signés avec le Comité national pour le salut du peuple (CNSP) ne sont pas respectés. Il s’agit notamment de l’application de l’article 39 qui induit une revalorisation salariale pour les enseignants.
Amadou Coulibaly, secrétaire général du Syndicat national de l’éducation de base (Syneb) croit que les enseignants doivent voir leurs revendications satisfaites sous le Premier ministre Moctar Ouane :
« Il y a plusieurs fronts qui sont là, dans le monde du travail. Nous avons déjà signé un accord. Et si l’application n’intervient pas sur le salaire du mois de novembre, nous irons en grève. Il n’y a même pas à discuter. »
Des élections transparentes
La question urgente reste aussi les réformes institutionnelles et constitutionnelles. Les élections législatives contestées d’avril dernier ont été le détonateur de la crise politique malienne. Le premier ministre Moctar Ouane doit être en mesure de céder son fauteuil après des élections transparentes.
Ibrahima Sangho, spécialiste des questions électorales et de gouvernance, préconise la relecture des textes qui encadrent les élections au Mali :
« La relecture des textes, c’est d’abord par rapport à la Constitution du 25 février 1992 qui a donné des pouvoirs exorbitants à la Cour constitutionnelle. Pour qu’on puisse avoir un organe unique de gestion des élections, il faut enlever les prérogatives, qui sont contenues dans la Constitution, à la Cour constitutionnelle. »
Priorité à la jeunesse
La transition doit durer 18 mois. Ce temps est suffisant toutefois pour améliorer la situation de la jeunesse, selon Adam Dicko, directrice exécutive de l’association des jeunes pour la citoyenneté active et la démocratie (AJCAD):
« Cette période transitoire est aussi l’occasion de ne plus mettre les jeunes au cœur des politiques mais de faire des jeunes les acteurs des politiques. »
Mme Dicko ajoute que « C’est vrai, la transition ne peut pas gérer tous les problèmes, mais il y a certains problèmes qui ne peuvent pas attendre la fin de la transition« .
Selon le politologue Moussa Sidibé, la transition est censée donner « les fondements solides » pour pouvoir poursuivre ensuite. Ça commence déjà par le gouvernement que va présenter Moctar Ouane.